Volkswagen Corrado G60 (1988-1991)
(Les Monts de la Locomotion, Bernay, Eure, mai 2013)
Dès 1984, il était décidé que la Scirocco II serait prolongée. Cependant, un prototype basé sur cette dernière avait déjà été lancé et son dessin était presque achevé. Que faire de cette nouvelle voiture ? Lui donner le rôle de remplaçante de la Porsche 944 ? Une traction ? Impossible. L'échec de la 914 a été suffisamment parlant. Alors ? Dans la guerre que se livraient les marques à coup de GTI et de 16 soupapes et qui commençaient à s'essoufler, Volkswagen allait fourbir une arme redoutable qui allait siffler le dernier round.
Encore une fois, la Scirocco aura une rame de retard par rapport à la Golf. Si la Scirocco II était conçue sur une base de Golf I, la descendante serait conçue sur une base de Golf II. Elle ne devait pas non plus en reprendre le nom et c'est "Taifun" qui a été choisi pour la nouvelle génération, un nom de vent encore une fois (Typhon). Cependant, General Motors a déjà déposé le terme, et après une longue séance de brain-storming, en unissant les mots "Sprint" et "Run" qui sont les maîtres-mots du projet, en touillant le tout à la sauce ibérique, c'est le nom "Corrado" qui est retenu. Reste à positionner la voiture. Les ambitions de Volkswagen sont de monter en gamme et la Corrado avait un temps été pressentie pour remplacer la 944. Le parti est pris de faire de la Corrado un coupé 2+2 haut de gamme. La voiture sera assemblée chez Karmann à Osnabrück, un gage de qualité.
L'accent est mis sur l'aérodynamique mais le design n'a pas été oublié. Utilisant la base de la Golf II, la ligne est rablée et trapue. La calandre avant est assez rectiligne mais préfigure celle à venir de la Golf III. Les feux additionnels dans le bouclier ne sont pas là que pour la décoration : ils renferment une paire de feux de croisement H4 et de feux de route H1. L'arrière très droit utilise des feux qui ne sont pas sans rappeler ceux de la Passat II. Un aileron termine la poupe et se déploie une fois passés 120 km/h, ce qui permet de fortement abaisser la portance sur le train arrière. La Corrado affiche un Cx de 0.32, une très bonne valeur pour une sportive de cet acabit. L'ensemble est très ramassé et la silhouette générale plutôt agressive. On sent la voiture sur quatre pattes prêtes à bondir. Avec le train avant de la Golf II (jambes de force, bras triangulés inférieurs, barre stabilisatrice et déport auto-stabilisant) et le train arrière de la Passat III (bras combinés, jambes de force et barre stabilisatrice), la Corrado a des atouts de véritable sportive. Le comportement assez neutre et rassurant est finalement assez pataud. La voiture n'est pas très réactive et son train avant pas assez insicif. Elle compense par des reprises franches mais déçoit sur ses appuis. Le freinage est, quant à lui, sans reproche (4 disques de 280 mm) avec ABS en série.
A l'intérieur, on retrouve l'esprit Volkswagen, et le propriétaire d'une Golf ne s'y sent pas dépaysé. L'équipement est à l'avenant et la joie à bord n'a jamais été le caractère spécifique des Volkswagen. Le poste de conduite est du type cockpit, avec une console centrale qui revient entre les deux sièges avant et une planche recourbée face au conducteur La direction assistée est de série, mais en dehors de l'autoradio et de l'ordinateur de bord multi-fonction, VW n'a pas doté la Corrado d'attention particulière pour ses clients. La climatisation, la colonne de direction réglable en hauteur et en profondeur, les vitres électriques restent en option ! Ses petites places arrière ne l'ont pas servie et il lui a manqué un peu plus de polyvalence pour être mieux vendue, même si le coffre revendique 300 litres et que la banquette rabattable le déploie à 838 litres !
Tandis que Peugeot et Citroën en sont à préparer les 309 GTI 16s et BX 16 Soupapes, que Renault peaufine la Renault 19 16s, Volkswagen qui dispose de la Golf II GTI 16s, s'apprête un frapper un grand coup à peu de frais. Il est vrai que les concurrents passent à peine aux multi-soupapes quand, du côté allemand, on s'y était converti bien plus tôt. Si bien que le 1800 de la Golf GTI 16s ne fournit que 136 ch. Alors pour suivre le mouvement sans se ruiner, Volkswagen est allée lorgner du côté d'un vieux brevet français, le compresseur spiro-orbital dit compresseur de type G (G-Lader) en raison de la forme des spirales. Abandonné très vite à l'époque en raison de l'imprécision des matériaux utilisés qui le rendait finalement peu efficace, ce compresseur n'a été utilisé qu'à partir des années 1970 pour des climatiseurs de faible puissance. L'amélioration du niveau de qualité de l'usinage, les ajustements plus précis permettent alors d'imaginer de transposer le procédé à l'automobile. Le système procure des avantages similaires au turbo-compresseur en termes de gain de puissance tout en étant linéaire et sans effet "on/off", avec une fiabilité supposée supérieure en raison de l'absence de graissage. L'inconvénient est qu'il est entraîné par le vilebrequin et "mange" un peu de puissance. Toutefois avec un compresseur de 60 mm de diamètre (en fait 59,5 mm, d'où le G60), le moteur 1800 à huit soupapes de 112 ch de la Golf GTI 1800 et de la Golf II GTI passe à 160 ch à 5600 tr/min et surtout 23 mkg de couple à 4000 tr/min, tout en abaissant le taux de compression de 10 à 8:1. Le compresseur générant des forces supplémentaires, les bielles ont été renforcées. Du fait des températures plus importantes générées par le compresseur, le joint de culasse a été renforcé et la culasse a subi un traitement thermique spécifique. De même les soupapes d'échappement sont refroidies au sodium.
Au niveau des performances, la Corrado G60 met un vent à toute la concurrence avec 225 km/h en pointe, 8,3 s de 0 à 100 km/h et le kilomètre franchi en 29 s. Son couple disponible de 20 mkg disponible de 2400 à 5700 tr/min permet même des reprises étonnantes. Il faudra attendre quelques mois la 309 GTI 16s plus légère de 200 kg pour que les forces s'équilibrent et se stabilisent pour un temps. Si les puissances continuent d'augmenter par la suite, le poids des voitures augmente également, si bien que le performances stagnent.
Ainsi au Salon de l'Automobile de Paris en octobre 1988, Volkswagen présente la Corrado, un coupé sportif et non plus une "GTI", catégorie dont la marque allemande est à l'origine mais dont la clientèle se lasse. Le vent est au retour des coupés sportifs qui avaient été occultés par la mode des GTI. L'arrivée de l'Opel Calibra en est un autre témognage. Bien positionnée en sportive, la Corrado G60 était commercialisée près de 202 000 F (environ 30 000 € de l'époque, 49 000 € actuels), quand la concurrence pouvait s'acquérir pour un tiers de moins. Si l'idée était de monter en gamme, le marché s'avérait étroit. Aussi le besoin d'un modèle plus accessible est vite devenu une évidence. C'est ainsi qu'en mars 1990 est commercialisé la Corrado 16V, équipée du moteur de la Golf II GTI 16s, puis remplacé par le 2.0 16 s de la Golf III GTI 16s en 1992, mais avec un culasse modifiée abaissant la puissance de 150 à 136 ch. L'une comme l'autre affichent des performances similaires, la 2.0 se distinguant par une meilleure souplesse. Elles atteignent toutes les deux 208 et 210 km/h en pointe. En 1993, une autre version d'appel est lancée avec le moteur de la Golf III GTI de 115 ch. Si les ventes ont progressé, elles n'ont jamais atteint les sommets attendus.
En octobre 1991, la Corrado G60 est remisée au placard au profit de la Corrado VR6, équipée du même moteur V6 à 15° que la Golf, mais dans une version gonflée à 2.9 litres et 190 ch (sauf Suisse et Amérique du Nord qui conservent le 2.8 de la Golf VR6). Cette dernière sera considérée comme très aboutie, mais mal desservie par une consommation somme toute importante, un prix plutôt dissuasif et une fiscalité française rédhibitoire.
En définitive, entre octobre 1988 et fin juillet 1995, la Corrado a été fabriquée à 97 521 exemplaires. Elle n'a pas été remplacée, et il a fallu attendre 2008 pour que Volkswagen se lance à nouveau dans le segment, avec la Scirocco III.
Actuellement, la Corrado est à la porte des Youngtimers, mais son peu d'exemplaires diffusés lui autorisent encore une côte élevée. En version G60 elle a moins souvent êté maltraitée par le tuning que la 16V, mais ça n'empêche pas leurs propriétaires d'en demander des sommes délirantes. En bon état de conservation, la côte se situe entre 4500 € et 5000 €. Mais elle devrait rapidement augmenter.
Fiche technique :
Moteur : 4 cylindres en ligne, essence
Emplacement : transversal, avant
Puissance fiscale : 7 CV
Cylindrée : 1781 cm3
Alésage x course : 81 x 86,4 mm
Taux de compression : 8:1
Vilebrequin : 5 paliers
Puissance maximale : 160 ch à 5600 tr/min
Couple maximal : 22,9 mkg à 4000 tr/min
Distribution : arbre à cames en tête
Nombre de soupapes : 8
Alimentation : injection électronique Digifant
Suralimentation : compresseur G-Lager (0,7 bar) + échangeur air/air
Type de transmission : traction
Boite de vitesses manuelle à 5 rapports
Direction à crémaillère, assistée
Suspension av : roues indépendantes type McPherson, bras triangulés inférieurs, barre stabilisatrice et déport autostabilisant, ressorts hélicoïdaux
Suspension ar : roues indépendantes type McPherson, barre stabilisatrice, bras radiaux et bras tirés, ressorts hélicoïdaux
Longueur : 404,8 cm
Largeur : 167,4 cm
Hauteur : 131,8 cm
Empattement : 247 cm
Voie av : 143,5 cm
Voie ar : 142,8 cm
Pneus av : 185/55 VR 15
Pneus ar : 185/55 VR 15
Freins av : disques ventilés (280 mm)
Freins ar : disques (280 mm)
ABS en série
Vitesse maximale : 225 km/h
0 à 100 km/h : 8,3 s
400 m D.A. : 16,2 s
1000 m D.A. : 29,6 s
Capacité du réservoir : 55 litres
Consommation moyenne à 90 km/h : 6,4 l/100km
Consommation moyenne à 120 km/h : 8,4 l/100km
Consommation moyenne en cycle urbain : 12,4 l/100km
Volume du coffre : 300 litres
Cx : 0.32
Poids : 1115 kg