Dodge Ram SRT-10 (2004-2006)
(Caux-Rétro, Allouville-Bellefosse, Seine-Maritime, juillet 2012)
Si chez nous le pick-up est un véhicule à vocation utilitaire, il est considéré outre-atlantique comme un véritable art de vivre, très prisé pour sa polyvalence. Depuis l'après-guerre et les Ford F-1 (voir ici un F-47, version canadienne du F-1), puis les F-100, tous les constructeurs américains ont intégré un pick-up, tout-terrain ou non, à leur gamme. C'est également de cas de Dodge, qui a conçu le pick-up de série B à la fin des années 40, remplacé par la série C dans les années 50, puis par la série D au début des années 60. Depuis le début des années 80, c'est le "Ram" qui a endossé le rôle, au point d'en être à la quatrième génération depuis la fin des années 2000.
Mais quand on s'appelle Dodge et qu'on a au catalogue la Viper SRT-10, l'idée saugrenue de transposer le moteur V10 dans le Ram est très tentante. Et le Ram SRT-10 (troisième génération) devient le pick-up de tous les superlatifs. Animé par le fameux V10 de 8,3 litres (soit le plus gros moteur de la production mondiale), le pick-up s'offre 505 ch, et le couple plus que généreux de 72 mkg. Toute poussée sur l'accélérateur se traduit par une violente poussée du train arrière, rigide bien entendu. Sans contrôle de trajectoire ou d'anti-patinage, l'engin se dompte plus qu'il ne se conduit. Même si les trains ordinaires du Ram ont été améliorés, si des jantes de 22 pouces viennent apporter un minimum de stabilité, les sorties de virage sur chaussée grasse tiennent plus de l'équilibrisme que du pilotage. Malgré ses 2,3 tonnes sur la bascule, la boite automatique de série (sur double cabine, en option sur cabine simple), les pneus de 305 mm de large, la puissance est toujours passée au sol avec rage et les survirages doivent toujours être anticipés. Heureusement, le freinage emprunté à la Viper est à la hauteur de l'enjeu. Sur sol sec, l'engin est plus facile à manoeuvrer, mais à haute vitesse le flou devient artistique.
Coté équipement, la dotation se veut haut de gamme. L'accastillage est généreux, mais quelque peu tape-à-l'oeil, avec des excroissances de carrosserie un peu partout et une large bouche d'aération sur le capot. A bord, on trouve une sellerie cuir/alcantara de série, le siège conducteur réglable électriquement, les deux étant chauffants. Chose rare, le pédalier est également réglable électriquement. L'instrumentation est assez riche avec les cadrans de pression d'huile, de température d'huile, de température d'eau ou l'ampèremètre. Mais surtout l'oeil est attiré par un bouton rouge placé sur le tableau de bord, qui permet d'allumer le moteur et de déclencher le son rauque et crépitant du V10. Si le reste de l'équipement est correct, on est un peu déçu des prestations d'une voiture de près de 75000 €.
Sur le papier, le RAM SRT-10 est évidemment le pick-up le plus rapide du monde avec 250 km/h en pointe (248 km/h de moyenne sur un kilomètre), moins de 5 secondes pour atteindre 100 km/h et franchit les 400 m départ arrêté en 14 secondes. Côté consommation, si les données constructeur annoncent 19 litres en cent, y parvenir relève de la gageure et les 25 litres sont plus réalistes.
Véhicule inclassable, le Ram SRT-10 est déraisonnable à souhaits. Entre une puissance démesurée, des dimensions qui le rendent presque inutilisable en ville, une consommation de poids-lourd, des performances à faire pâlir un coupé de Grand Tourisme, le Ram SRT-10 est, en définitive, une voiture "plaisir" ou simplement une vitrine technologique. D'ailleurs, il n'a pas été importé officiellement en Europe, et seuls 9527 exemplaires ont été fabriqués entre 2004 et 2006 ! La preuve qu'un moteur seul le suffit pas à faire un succès !